Plus De 15.000 Enfants Sans Papiers à Sédhiou
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Au cours d’un atelier de sensibilisation des maires et des officiers d’état civil sur la maitrise de l’état civil, organisé le jeudi dernier par Amnesty International, l’autorité préfectorale rappelait qu’en 2014, Sédhiou était à 17.500 enfants sans papiers d’état civil. Il a souligné qu’avec les audiences foraines, 7500 enfants ont pu obtenir le fameux sésame et qu’il restait à ce jour un gap de 10.000 enfants non déclarés.
Mais du côté de l’inspection de l’éducation et de la formation (Ief), les chiffres sont plus parlants voire alarmants. Sur les 150 écoles élémentaires publiques du département de Sédhiou, les 36 qui ont déposé leurs fiches de renseignement relatives aux enfants sans papiers totalisent 2525 cas. Quelques cas de figures effarants sont notés à l’école élémentaire Ciré Ndiaye, située au village de Bloc dans la commune de Diendé avec 247 enfants sans papiers. A l’école du village de Bouno, dans la commune de Bambaly, il y a 215 et 192 à l’école de Kindakam. A cette situation déjà préoccupante, s’ajoutent les cas pathétique des départements frontaliers que sont Bounkiling et Goudomp où la situation est envenimée par le mouvement des populations des pays limitrophes vers le Sénégal.
Seydi Gassama d’Amnesty International a cité d’abord les cas des enfants issus des pays voisins et qui sont scolarisés ou adoptés au Sénégal. Il explique que ces derniers dont les parents n’habitent plus les zones frontalières, ne peuvent pas disposer des pièces de leurs parents pour constituer leur dossier. Ensuite M. Gassama a souligné le cas des enfants dont les parents sont décédés et ceux dont les parents, en fuyant la guerre, ont tout abandonné. De son avis, les parents ayant quitté leur pays d’origine, il y a plus 20 ans, sans pièces d’état civil, auront du mal à en trouver pour leurs enfants.
Enfin, il a conclu que «ces enfants, en grand nombre, éprouvent d’énormes difficultés à accéder à l’état civil ». Aujourd’hui, malgré la sensibilisation des pouvoirs publics, les racines du mal tiennent encore bon. En tout cas c’est ce que semble soutenir Mamadou Lamine Bodian, directeur de l’école élémentaire Chérif Younouss Aïdara (école 2). « Notre école et l’école franco arabe ont organisé l’année dernière une marche autorisée pour alerter l’opinion publique sur la question. Mais rien n’a évolué », s’est-il désolé regrettant même que son dossier soit perdu dans les tiroirs de l’administration locale.
« De la mairie au tribunal en passant par le développement communautaire, personne ne peut nous situer notre dossier composé des cas recensés. Qu’on me ramène mes statistiques si on n’a pas la solution », a-t-il dit en signe de résignation. A la question de savoir pourquoi on ne peut pas exiger les papiers à l’inscription, Mamadou Lamine Bodian retourne le fusil contre l’inspection. «Devant le droit à l’éducation de l’enfant, l’absence de pièces d’état civil ne saurait être une contrainte. Encore que, ce sont les autorités de l’éduction qui nous demandent de faire des efforts s’ils constatent que le taux de recrutement au cours d’initiation n’est pas élevé. Or, reconnait le directeur, si l’état civil n’est pas là, les données ne sont pas fiables». Cette massification des enfants sans papiers s’expliquent également, selon certains, par le fait que certains directeurs inscrivent tout venant dans le seul objectif de disposer d’un grand effectif pour atteindre 12 classes.
C’est la condition à remplir pour être déchargé des enseignements et d’avoir une indemnité d’au moins 12.000 francs. Une idée que Mamadou Lamine Bodian rejette précisant même qu’il a refoulé, faute de place, des parents qui voulaient inscrire leurs enfants. Coumbamang Danso, le président de l’Union régionale de l’association des parents d’élèves (Urap) n’y voit que l’irresponsabilité et la négligence des parents. «A l’hôpital, les parents d’un nouveau né reçoivent un papier qui leur permet de faire la déclaration de leur enfant gratuitement à la mairie. On a tout fait, tout dit, mais rien ». Selon l’inspecteur Alioune Bâ, l’académie a fait un plaidoyer auprès des autorités de la justice et a obtenu l’autorisation d’organiser des audiences foraines pour endiguer le mal. Seulement, il reste le pari de la communication pour une mobilisation sociale autour de la question.
Auteur: Paul FAYE Correspondant Seneweb.com – Seneweb.com
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